Nicaragua : Leon, lorsque mon coeur s'est embrasé

Pendant de nombreux jours, j’ai hésité à me rendre dans la capitale du Nicaragua : Managua. Sa mauvaise réputation est telle, aussi bien de la part des touristes que des locaux, qu’il est difficile de se forger une opinion. Le plus logique serait donc de s’y rendre et de voir par soi-même. Et bien, je ne sais pas pourquoi, mais cette fois-ci mon instinct m’a avertit d’un danger. A tord ou à raison, j’ai toujours préféré l’écouter. Je préfère donc faire route vers Leon.

Arrivée au terminal de Leon, un américain coiffé d’un chapeau mexicain vient à ma rencontre pour me vendre une auberge de jeunesse. Généralement, je ne prends même pas la peine d’écouter les rabatteurs. Mais dans le cas présent, l’affaire était alléchante : 5$ par nuit, avec billard et piscine à disposition ! Ni une, ni deux, je saute dans un tuktuk vélo (très loin de mes habitudes) car son propriétaire, avec qui j’ai discuté plus d’une heure sur place, était très sympathique et motivé pour économiser de l’argent et partir au Brésil.

Tout au long de l’après-midi, j’arpente les artères de Leon, en large et en travers. La ville me charme par son aspect désuet. Les murs semblent avoir perdu de leur éclat et arborent un air mélancolique. Le temps s’y est arrêté contrairement à sa sœur ennemie, Granada, tout de couleurs pimpantes. Les fresques, peintes ici et là, pour les besoin de la propagande socialiste, finissent par offrir un cachet assez particulier à Leon.

Le lendemain je passe une petite après midi sur la plage de Las Peñitas. Les lieux sont quasi-déserts. Il n’y que quelques touristes qui osent s’y aventurer. Quatre jeunes s’approchent et commencent à discuter avec moi. Malgré qu’ils soient très courtois, je reste (toujours et malheureusement) méfiant. Puis une jeune blonde court vers l’un d’entre eux et l’embrasse à pleine bouche. Elle est canadienne et n’a que 17 ans. J’apprends qu’elle a décidé de rester dans ce village pendant deux mois plutôt que de traverser le pays comme 99% des étrangers. Cela fait du bien de voir des gens qui ne suivent pas...

...bêtement un rail au cours de leur voyage.

Je pensais rester à Leon deux petits jours, mais voilà près de deux semaines que j’y suis. Je ne parviens pas à me défaire de l’ambiance ensorceleuse et envoutante de la cité. Les habitants, hospitaliers et chaleureux, y sont également pour quelque chose. J’ai pris mes habitudes quotidiennes. Je mange aux même endroits et ne manquent pas de saluer tout ceux qui me reconnaissent. Toutes mes après-midi, je les passe à jouer au billard avec mes compagnons d’hôtel. Le soir venu, je me dirige vers le même bar. Je m’y rends souvent avec le personnel de l’hôtel, qui une fois par semaine, profite de leur unique journée de repos pour écouler quelques bières. Inlassablement, je ne reviens à ma chambre qu’à l’aube. C’est ce qu’on appel ici, la « semana loca » :

 la semaine ou la fête a pris le pas sur la vie elle-même…

Lors d’une soirée, je me trouve accoudé au bar, côte à côte avec l’une des serveuses de l’hôtel où je loge. Au début timide, nous finissons par briser la glace et à faire connaissance. Nous discutons, rions puis dansons une bonne partie de la nuit sur les rythmes enchainés de la musique latino. Nous essayons de nous cacher du propriétaire du bar, qui n’est autre que le possesseur de l’hôtel et donc sn chef. Elle finit par me dire : « allons nous-en », je lui réponds « pourquoi faire ? ». Mon Dieux, mais quelle question stupide…Et oui, dès fois, je me demande vraiment ce qui se passe par ma tête. Heureusement, elle ne m’a pas entendu. Nous filons dans les ruelles de Leon, courant comme des enfants, main dans la main. Des éclairs jaillissent de toute part, l’ambiance devient électrique. Notre étreinte...

...s’embrase jusqu’au petit matin derrière le clocher de l'église.

Le lendemain matin, elle ne me décoche pas à un regard à l’hôtel. De honte ? De peur de représailles de son patron ? De timidité ? De regret ? Il faut dire, qu’à 28 ans, elle est déjà mère d’un enfant de 8 ans. Elle doit avoir d’autres priorités que de papillonner avec un voyageur, qui pour le moment, n’a que la route pour maison. Par contre, les employés de l’hôtel, eux se donnent à cœur joie, de se moquer de notre relation. Finalement, je décide de ne pas engager la conversation avec la serveuse pour aujourd’hui.

Un jour plus tard, je décide d’aller à sa rencontre lorsque les clients se faisaient plus rares et la laissaient souffler quelques minutes. Plus j’avance vers elle, plus son regard se fait fuyant et plus son teint rougit. Tel un séducteur des temps modernes, je lui dis : « ça va ? » (Pas trouvé mieux sur le moment). Elle tourne la tête puis finis par me répondre : « retrouve-moi après mon boulot ». Je n’ai pas le temps de poser une autre question (cela aurait été bien connaître l’heure et le lieu par exemple) qu’elle s’en va en cuisine. J’attends toute la journée jusqu’à ce qu’elle commande une bière vers 23 heures, après son service. Pour moi, c’est le signal. Je passe devant elle sans la regarder, puis sors de l’hôtel. Arrivée au bout du pâté de maison, je m’arrête au coin de la rue. Quelques minutes après, elle me rejoint…Nous engageons une conversation comme si de rien n’était. Nous allons de bars en bars puis nous nous nous retrouvons sur la place de Leon  vers 4 heures du matin, assis sur un banc public.

On sent que le moment n’est pas au divertissement, mais à bien au règlement de compte. Elle me fait comprend qu’elle ne « saisit » pas les « voyageurs » et leur volonté de changer constamment d’endroit, loin de leur famille. Comme bien souvent au cours d’un voyage, les histoires d’amours...

...ne sont que des impasses.

Coin pratique :

• Pour gagner Leon depuis Granada mieux vaut choisir les bus express. Ils sont certes plus chers, mais vous n’aurez pas à payer un taxi à Managua pour changer de terminal de bus. Cela compense.
• Prendre un bus Granada-Managua (université UCA) pour 22 cordobas puis un autre Managua (université UCA)-Leon pour 46 cordobas. Comptez en tout trois heures de trajet.
• A Leon, je vous conseil l’auberge de jeunesse Chili Inn. La moins chère (5$) et très convivial : billard, piscine et deux verres gratuit par jour !

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